Spectrohéliographe - Sol'Ex
Introduction :
Dans l'article « Construire un spectrographe rudimentaire », j'évoque succinctement la réalisation d'un spectrographe qui permet des observations limitées et assez superficielles. Dans cet article, je présente un spectrographe, tournée vers l'observation solaire. "Sol'ex" est né dans la tête de Christian Buil, fin d’année 2020. Ce dernier a imaginé la réalisation d’un spectrohéliographe (observation des raies spectrales du Soleil) qui permet une recomposition d’images du disque solaire et/ou de la couronne solaire dans différentes raies (Hydrogène, Calcium , etc…). Les images obtenues peuvent, dans une certaine mesure, approcher celles produites avec du matériel beaucoup plus lourd ou couteux (télescopes solaires ou même coronographes).
L’idée originale de C.Buil est d’avoir conçu cet appareil autour d’un kit optique (distribué par la société Shelyak) disponible ici : Kit Sol'Ex , qui se monte sur des pièces entièrement réalisables avec une imprimante 3D grand public. Plus de 150 amateurs, à travers le Monde, se sont ainsi lancés dans cette aventure. En dehors de l'ensemble optique et des accessoires nécessaires et souvent en possession des amateurs (caméra, lunette, prisme, monture), le coût de la réalisation des pièces imprimées en 3D, se réduit à l'achat du matériaux.
Remarque : Mon but n'est pas ici de reproduire les informations contenues dans le site Sol'Ex , mais de montrer qu’un tel projet qui, à priori, peut faire peur, est en réalité accessible à l’amateur, même peu expérimenté. Pour plus de détails, se référer au site régulièrement mis à jour et qui fournit les explications nécessaires au montage et à l’utilisation d'un Sol’ex.
Sol'Ex en trois mots :
Sol’ex reçoit la lumière solaire à travers une lunette de faible diamètre (équipée d'un filtre solaire de type Baader ou mieux d'un Prisme de Herschel ) fixée sur une monture équatoriale qui permet d'effectuer un balayage du disque solaire. Durant ce balayage, on enregistre une série d'images d'une raie spectrale donnée. Les images réalisées qui sont, en fait, une succession de "tranches" de Soleil, sont converties par le logiciel de saisie SharpCap en un fichier (.ser). Ce fichier sera ensuite traité grâce au logiciel de traitement téléchargeable ISIS qui recompose une image du disque et/ou de la couronne solaire.
Schéma optique :
Le schéma optique de Sol’Ex reprend les fondamentaux du spectrographe.
Le Spectrohéliographe :
Ci-dessous, mon Sol’Ex dont les pièces 3D ont été imprimées par Franck Vaissière dont l'expérience m'a aidée à franchir quelques étapes délicates. (A ce propos, il existe un forum d'échange pour tous les "solexiens" où chacun peut poser ses questions et recevoir des réponses précises et adaptées à son cas)
Réalisation d'un Sol'Ex :
Ci-dessous, l’ensemble des pièces « 3D » qui permettent l’assemblage des divers composants optiques. Je ne m’attarderai pas sur la construction de l’appareil qui fait l’objet d’une description détaillé sur le site Sol’ex. Les opérations d’assemblage sont par ailleurs assez ludiques et ne présentent pas de difficulté particulière si ce n'est que l'achat de quelques pièces de visserie ( vis, écrous, douilles )
- Montage du réseau sur son support rotatif.
- Assemblage du bloc collimateur, doté d’une fente orientable de 10 microns de large et d’une lentille de 90mm. (Il conviendra d’effectuer une mise au point soignée de l’objectif collimateur qui a pour objet d’envoyer vers le réseau des rayons parallèles entre eux ).
- Assemblage des deux objectifs fournis pour la caméra (60 et 125 mm) sur leurs tubes respectifs.
- Assemblage des deux faces du boitier support.
- Eventuellement, protection contre les lumières parasites (dans mon cas, mise en place d'adhésif aluminium sur les faces du boitier, après test avec une source de lumière )
NB : Pour un meilleur confort au niveau des réglages de mise au point, j’ai utilisé un « focuser » hélicoïdal (ci-contre) pour les deux objectifs (env. 30 euros sur internet ).
Matériel utilisé avec Sol'Ex:
Après avoir testé une lunette de visées de 50 mm de diamètre pour mes premiers essais, j’ai préféré utiliser une petite lunette apochromatique f/6 dotée d’un focuser Crayford, plus précis (TS 60/360mm Photo Line FPL53). Au delà de 400 mm de focale l'image du disque solaire est partielle, ce qui nécessite d'assembler plusieurs images en post traitement. J'utilise également une lunette apochromatique 80/550 mm qui me permet une meilleure résolution.
Prisme de Herschel :
L’observation du Soleil peut provoquer des lésions irréversibles à l’œil humain, si on ne prend pas de précautions.
Le prisme de Herschel est un accessoire absolument indispensable qui atténue le flux solaire issu de la lunette, en rejetant environ 95 % de ce dernier pour ne laisser passer que les 5% restants. Cette atténuation permet l’utilisation d’une caméra mais n’est pas suffisante pour une observation à l’œil nu, à travers un oculaire, car l’intensité demeure encore trop élevée.
IMPORTANT : Pour une observation du Soleil à l’œil nu, à la sortie d’un prisme de Herschel, il faut impérativement ajouter devant l’oculaire un filtre neutre de type ND3.0 qui atténue d’un facteur 1000 le flux sortant du prisme, en ne laissant passer que 0,1% de la lumière reçue.
Caméra Cmos :
Afin de pouvoir imager le spectre, la Caméra monochrome « ZWO ASI 290 mini » a été retenue, mais d’autre caméras peuvent être utilisées.
La « ASI 290 mini » USB 2.0 est une caméra initialement conçue pour l’autoguidage avec une lunette de faible diamètre. Elle dispose en effet d’une excellente sensibilité (pour sa gamme de prix) et d’un bon rendement quantique (80% de l’énergie est restituée). La taille de son capteur Cmos est de 5.6mm x 3.2mm. Sa résolution de 1936 x 1096 et la taille des pixels (2.9 x 2.9 microns) sont bien adaptés aux exigences de Sol’ex.
Ci-contre, mon installation. L'usage d'un ordinateur portable nécessite l'utilisation d'un "abri" pour le protéger de la lumière du soleil. En effet, les divers réglages de focalisation doivent pouvoir être effectués à partir de l'écran de l'ordinateur de manière soignée, ce qui ne serait pas le cas en pleine lumière.
Autre : Pour effectuer le pointage et le balayage ( de 8 à 16x la vitesse sidérale ) de la surface solaire, j’utilise une monture équatoriale.
Pour la prise de vue, j’utilise le logiciel de capture SharpCap 3.2. (disponible en téléchargement gratuit) associé à un ordinateur portable Acer Aspire VX5 (Core i7-2.8 à 3.8 Ghz - SSD 256Go-HDD 1To - GEforce GTX).
Premières raies spectrales :
A titre d’exemple, ci-dessous, quatre raies spectrales, telles qu’elle apparaissent sur l’écran de contrôle du logiciel de saisie:
Magnésium triplet caractéristique.
H.alpha (qui est certainement la plus exploitée pour imager le disque solaire).
Les deux raies (doublet) du Calcium H et K, elles aussi beaucoup utilisées.
La raie H.beta
Le doublet du Sodium
Remarque : Pour l’aspect pratique de la capture et du traitement des images ou la réalisation d'un dopplergramme, se référer au site de Sol’ex ou charger le document suivant : Solex en pratique que j’ai rédigé en m’inspirant du site de Sol’ex et de ma propre expérience et que je ferai évoluer au fil du temps.
Ci-dessous mon solex sur sa monture, prêt à fonctionner et avec le détail des différents éléments qui le composent.
Premières images :
(cette rubrique évoluera en fonction de la qualité de mes acquisitions futures)
Hydrogène alpha.
Hydrogène alpha – Colorisé.
Hydrogène beta
Calcium H
Dopplergramme :
L’effet Doppler provoque un décalage des raies spectrales, selon que l’objet visé s’approche ou s’éloigne. La spectrohéliographie peut mettre en évidence ce décalage et permet de visualiser, par exemple, la rotation du Soleil sur lui-même.
Ci-dessous, exemple d’un dopplergramme que j’ai réalisé à partir d’images prises sur chacun des deux bords de la raie Halpha.
Il apparait que la zone située à droite est plus sombre que celle de la partie gauche du disque solaire. Cet écart de luminosité, obtenu en faisant une différence entre les deux images issues de chacun des bords de la raie Halpha, met effectivement en évidence la rotation du Soleil sur lui-même. La zone claire s’approche de nous alors que la zone sombre s’en éloigne.
Pour mieux visualiser cet effet, il est possible de coloriser un dopplergramme en remplaçant les parties sombres par la couleur rouge et les parties claires par du bleu. Ainsi le bleue et le rouge traduisent visuellement ce décalage de spectre dû à l’effet Doppler; ce même effet perceptible auditivement en écoutant le son de la sirène d'une ambulance (aigüe/bleu) et (grave/rouge) qui respectivement s’approche ou s’éloigne de l’observateur.
Ci-dessous, un dopplergramme réalisé le 26/06/2021 à partir d'un script* disponible ici Dopplergramme qui permet, de réaliser des spectrogramme à partir de deux images du Soleil prises sur chaque bords d'une raie spectrale donnée.
* Une fois les deux images chargées, cliquer sur "exécuter" pour afficher l'image traitée. Bien que peu esthétique, elle contient toutes les informations nécessaires. Il suffit alors de la copier et de l'ouvrir par exemple sous Photoshop puis de faire " couleurs automatiques " et ensuite d'agir sur le curseur saturation...
Remarque : Depuis Décembre 2021, le programme INTI, a évolué et propose dans son menu une option dopplergramme. (Le script proposé précédemment reste cependant fonctionnel )
Nouveau-né dans le monde de l’astronomie amateur, Sol’ex est encore loin d'avoir atteint sa maturité et révélé tout son potentiel. Un projet de Star'ex est en effet en cours de réalisation avec des pièces optiques déjà disponibles (Sheliak), il s'inspire de l'architecture de Sol'ex et permet de sonder les étoiles et le ciel profond, afin de tracer un profil des objets observés et ainsi d'obtenir des informations sur son stade d'évolution, sa classe , etc...
à suivre ...