Les dérives du savoir
La création de calendriers n’est qu’un témoignage parmi d’autres des pratiques liées à l’astronomie chez certains peuples. Chaque civilisation, depuis ses origines, s’est efforcée de compter le temps. Probablement même cette nécessité contribue t-elle d’une certaine manière au développement de l’astronomie. Je ne saurais commenter ici les apports de chacun de ces peuples, tant une énumération exhaustive serait fastidieuse et nous égarerait de notre sujet premier. Cependant, avant de découvrir la manière novatrice avec laquelle les Grecs ont abordé l’étude du ciel, je voulais souligner le point important qui concerne les usages détournés de l’astronomie au nom de la maîtrise d’un prétendu savoir.
Le nomadisme qui caractérise les premières tribus humaines, les a conduites, au fil des millénaires, à investir différentes régions de notre globe. Le ciel sert probablement de repère au cours de ces périples. Ces peuplades qui ont sans doute remarqué certains astres au comportement singulier, les ont dissociés des autres étoiles familières relativement fixes. Ces astres « errants » semblent avancer, reculer, rester stationnaires, décrire des courbes diverses et leur éclat subit des variations périodiques. Les observateurs primitifs finissent par constater qu’ils reviennent parfois à une période régulière en un même point du ciel. Ils attendent donc leur retour et apprennent ainsi à comptabiliser le temps. Lorsqu’ils parviennent à déterminer la durée de ces cycles et à prédire certaines conjonctions célestes, leurs prédictions leurs octroient des pouvoirs considérables et une grande importance aux yeux des leurs. D’après certains chercheurs, ce sont les cycles distincts de ces planètes qui donnèrent initialement aux hommes l’idée d’un univers élaboré, constitué de différents niveaux, cieux ou strates, revêtant des formes issues de leur imagination, parfois montagnes, fleuves, mers, plateaux ou mondes souterrains. Ces lieux devinrent la résidence principale de leurs divinités. Les prêtres astronomes incitèrent alors leurs peuples crédules à commettre les pires abus pour apaiser les supposées colères de leurs divinités à travers des cérémonies souvent assorties de rites sacrificiels.
Chez des peuples païens, comme les Chaldéens, les Indous, les Malais, les Mayas, les Égyptiens ou les Chinois, on retrouve une cosmogonie organisée sous forme de strates. Il semble que dans les civilisations orientales, les croyances ancrées depuis les temps les plus reculés ne furent jamais remise en cause par l’astronomie. Les observateurs qui font naïvement confiance aux témoignages de leurs sens, ne soupçonnent pas que ces apparences les induisent en erreur. Dés lors, il n’ont plus à se préoccuper d’expliquer les phénomènes qu’ils observent par des hypothèses satisfaisant aux exigences de l’entendement; Il leur suffit d’en faire une interprétation. La science des cieux n’a pas su trouver chez ces peuples la quête d’une vérité exempte de croyances ou superstitions. Elles ne fait que traduire leurs angoisses et les précipite vers les pratiques idolâtres qui révèlent les aspects les plus sombres de la nature humaine. Les « messes primitives » répandent les ferments d’une astrologie qui ne tardera pas à s’ériger en véritable puissance occulte dont les ramifications n’épargneront aucune des civilisations ultérieures, y compris grecques et romaines. Cependant, apparait en parallèle chez les Grecs, une pensée philosophique élaborée à partir de l’idée que l’homme est libre et qu’il peut devenir indépendant, s’il parvient à une compréhension du monde. Sous cet aspect, le ciel parait tout autre à leur regard. L’un d’entre eux se nomme Anaximandre.