Roger Bacon (1220-1292)

Roger Bacon (1220-1292) est né dans le Dorsetshire en Angleterre. Il étudie d’abord à Oxford puis à Paris où il obtient le titre de docteur en théologie. Il y enseigne la physique et la métaphysique d’Aristote. De retour à Oxford, influencé par Robert Grossetête, il se consacre à l’étude expérimentale. Il entre en 1240 dans l’ordre des franciscains puis, en 1257, il revient à Paris. Il déplore l’ignorance de ses coreligionnaires mais la censure le contraint au silence. Sa culture est immense, elle recouvre linguistique, grammaire, philosophie, mathématiques, physique, géométrie, alchimie, médecine et astronomie. La partie scientifique de son œuvre se particularise par une mise en avant des mathématiques et de l’expérimentation. Il se démarque d’Aristote, dont les principes sont considérés alors comme les seuls acceptables, en affirmant que l’expérience est la « reine des sciences » et, qu’elle seule conduit aux découvertes et à leurs vérifications. Il place les mathématiques au dessus des autres disciplines. Selon lui, la méthode scolastique, qui prend appuis sur l’autorité dans l’édiction des principes et sur le raisonnement dans leur développement, est mauvaise. Il ajoute que nul progrès scientifique ne peut être effectué, si on ne prend pas en compte certaines conditions qu’il définit suivant quatre principes:
En premier: « Il convient de s’informer sur l’importance et l’utilité de la discipline que l’on explore ».
En second: « II faut déterminer son objet et son cadre, afin de ne pas s’égarer en vaines superfluités ou la mutiler par omission ».
En troisième: « Il faut déterminer les causes d’erreurs qui peuvent nous tromper ».
En dernier point: « Il faut que l’homme se dévoue à la recherche de la vérité, connaisse les méthodes et les voies par lesquelles il doit la trouver, l’agrandir, la rendre parfaite, tant en général qu’en particulier, car il y a une méthode en toute chose et si on en manque , on ne pourra jamais atteindre le but proposé »
Roger Bacon devient ainsi le père de la méthode scientifique.

L’astronomie est pour lui la discipline qui fait converger de la manière la plus apparente, la physique et la géométrie. Il la divise en trois parties: l’astronomie spéculative, celle de l’Almageste qui propose un système. L’astronomie pratique, celle ou on effectue des calculs, où on dresse des tables et où on exploite toute sorte d’instruments. Et enfin, l’astronomie physique, qui étudie l’influence des astres sur la Terre, leur trajectoire et l’ordre des saisons. A ses yeux le monde se compose, à la différence de Parménide, de « corps divers » et non d’un seul « tout »; il est constitué de corps finis et divisibles et non pas d’atomes indivisibles et infinis en nombre, comme l’a proposé Démocrite.

Le ciel est une sphère dans laquelle réside le feu, l’air, l’eau et la Terre, elle-même sphérique située au centre de tout. Au sujet des mouvements des corps célestes, il contredit aussi les astronomes arabes, sans pour autant être capable de formuler une autre proposition. Il s’oppose encore à Aristote en déclarant que la lumière des étoiles leur est propre et que celle de La lune est due au soleil. Il définit également la Voie lactée comme: « un agrégat d’une multitude de petites étoiles indiscernables » et commente la réfraction astronomique. Il traite le premier de la déviation des rayons lumineux pénétrant dans l’atmosphère et étudie les couleurs de l’arc en ciel « de iride ». On lui attribue la découverte d’un mélange explosif, la conception de lentilles en verre grossissant ou d’une pompe à air permettant d’évoluer sous l’eau, ainsi qu’une multitude d’autres inventions qui, à l’image de celles de Léonard de Vinci, resteront à l’état de concept. Bacon propose une réforme du calendrier Julien, car il prétend qu’il donne une fausse date de naissance pour le Christ. On admettra qu’il ait pu déranger sa hiérarchie au point qu’elle le condamne à quinze années de prison, en accusant ses ouvrages de renfermer des « nouveautés dangereuses et suspectes ». Bacon mourra infirme et malade à sa sortie de dix années d’incarcération. En ce XIIIème siècle, la camisole idéologique et religieuse qu’imposait la soumission au dogme, se traduisait par un gâchis intellectuel dont bien des penseurs et scientifiques « libres » firent les frais.