Giuseppe Piazzi (1746-1826)

Gioacchino Giuseppe Maria Lebaldo Nocolo Piazzi (1746-1826 ) est né à Ponte dans le Valtellina à proximité de la frontière entre l’Italie et la Suisse. Sa famille est une des plus riches de la région. Avant dernier d’une fratrie de onze enfants, dont la majeure partie a succombé après la naissance, le petit Giuseppe ne sera pas conduit à l’église pour y être baptisé. C’est le prêtre qui viendra faire ses offices à domicile pour éviter tout danger au nouveau né. Comme c’est l’usage dans les familles aisées, il y a presque toujours un ecclésiastique dans la famille. Ce sera le cas de Giuseppe qui, à dix neuf ans, rejoint l’ordre des Théatins. Dans cet ordre, les membres sélectionnés selon leurs capacités intellectuelles font vœu de chasteté, de pauvreté et d’obéissance, l’exemplarité et la règle. On ne connaît pas de détail sur la jeunesse de Piazzi. On le retrouve, de 1770 à 1780, professeur de mathématiques et de philosophie à Gênes, Rome puis à Ravenne. Reconnu dans ses fonctions, en 1781 il est nommé directeur de la faculté de mathématiques de la Reale Accademia degli Studi , qui deviendra, vingt cinq ans plus tard, l’université de Palerme. En 1787, on lui confie la direction de l’observatoire de Palerme qu’il souhaite aussitôt rénover. Il se heurte alors à quelques avis défavorables et décide de partir pour la France et l’Angleterre. Son voyage dure trois ans et lui permet de rencontrer les plus grands astronomes contemporains. A Londres, il s’entretient avec Maskelyne et Herschel et commande à Ramsden un cercle zénithal de cinq pieds. A Paris, il fait la connaissance et passe du temps avec La Lande, Méchain, Messier et Cassini. De retour à Palerme en novembre 1789, il est bien résolu à réaliser des travaux d’emménagement pour son observatoire qu’il installe en moins de six mois au sommet de la tour Santa Ninfa, située sur des vestiges de l’occupation Normande en Sicile (gravure ci-dessous). Piazzi peut enfin y installer le cercle que Ramsden aura mis prés de trois ans  à fabriquer avant de pouvoir le lui faire livrer.

Dés les premières essais, l’instrument tient ses promesses. La Lande qui en connaissait la conception, n’avait-t-il pas déclaré que sa précision était supérieure à tout autre instrument existant. Piazzi s’en sert pour établir un catalogue qui comprend prés de 7.000 étoiles. Afin de fiabiliser ses mesures, il ne note aucune étoile avant d’avoir effectué au moins quatre observations consécutives sur chacune d’elle. La nuit du 1er janvier 1801, alors qu’il arpente la constellation du Taureau, à la recherche de l’étoile 87, Piazzi remarque un objet voisin, de faible intensité, qu’il consigne sur son cahier en tant que « petite étoile de huitième grandeur ». Comme il a l’habitude de le faire, le soir suivant, il recherche cet objet et le trouve à une autre place; de même pour les trois jours qui suivent. Piazzi pense avoir découvert une comète. Il communique sa découverte à La Lande, à Bode et à Barnabé Oriani, alors directeur de l’observatoire de Milan. Il pressent qu’il s’agit de quelque chose d’important, mais préfère rester sur sa réserve. Courant janvier, il a, en effet, écrit une lettre à Elert Bode qui laisse peu de doutes à ce sujet.

Dans ce courrier on peut lire: « J’ai annoncé que cette étoile était une comète. Depuis, elle n’a laissé apparaitre aucune nébulosité. Je suppose donc  qu’il pourrait s’agir d’autre chose de bien mieux qu’une comète. Je ne souhaite pas pour le moment divulguer ce qui n’est qu’une conjecture. Lorsque j’aurai davantage d’information sur cet objet je me repencherai sur cette question. ». Piazzi suivra « son » astre jusqu’au 11 février, mais tombé malade il devra  interrompre ses observations. Rétabli en fin de mois, il reprend sa lunette mais la planète a disparue. Il s’en suit un certain embarras dans la communauté astronomique, à propos de la nature de cet astre qui demeure alors une énigme. Un jeune mathématicien, qui deviendra célèbre par la suite, décide de soumettre les relevés de Piazzi au calcul. Il parvint à tracer la courbe que l’astre fugitif était censé parcourir. Il établit ainsi que ce dernier devrait réapparaitre vers la fin de l’année et il peut même en préciser le lieu précis. Les grands astronomes accordèrent cependant peu d’attention aux affirmations de ce jeune inconnu.

Probablement par acquis de conscience, en Janvier 1802, un astronome autrichien, le baron Franz Xaver von Zach, dirige sa lunette à l’endroit indiqué l’année précédente par ce jeune homme nommé Carl Friedrich Gauss. Il retrouve bien l’énigmatique objet, mais il reste incrédule et adopte provisoirement une attitude réservée, afin d’éviter le ridicule. Plus avisé, un amateur de Brème, le docteur Henrich Olbers utilisa les informations de Gauss pour établir une carte sur laquelle il traça la trajectoire que devait suivre la « comète » de Piazzi. En effectuant un relevé de cette région du ciel, le 1er janvier 1802, puis un autre, le lendemain, il remarque qu’un objet s’est déplacé. Il continue ses observations jusqu’au 06 janvier et constate que l’objet errant suit précisément le tracé de sa carte. Certain qu’il s’agit bien de l’objet découvert par Piazzi, il communique ses résultats. Aussitôt le travail de Gauss est reconnu par la communauté scientifique, tous les éléments sont requis pour démontrer que la comète de Piazzi est une planète en orbite autour du Soleil. A cette occasion, la loi des répartitions de Titius-Bode qui implique une planète « manquante » prend tout son sens. Piazzi qui a découvert cette planète, située entre Mars et Jupiter, souhaite la baptiser « Cérès Ferdinandia » afin d’honorer, tout à la fois, la déesse sœur de Jupiter longtemps célébrée en Sicile, ainsi que le roi Ferdinand III de Bourbon. La communauté des astronomes en décide autrement et la baptise « Cérès ». En 1803, a l’occasion de la publication de son catalogue l’Académie des sciences de Paris décerne à Piazzi le prix de mathématiques et de physique, il est alors élu correspondant. En 1817, il en deviendra associé étranger. Il est également élu fellow  par la Royal Society. Cette planète fut par la suite observée et étudiée par un grand nombre d’astronomes dont Méchain, Herschell, Maskelyne, Bode et Encke .

Ces derniers calculèrent qu’elle effectuait une révolution en 1.680,75 jours, que son orbite était inclinée de 10° 36’ 28’’ sur le plan de l’écliptique (schéma ci-dessus) et que sa distance moyenne au Soleil était de 2,767 fois celle qui sépare la Terre de ce dernier. En dehors de sa découverte, Piazzi a aussi travaillé sur le changement de l’obliquité de l’écliptique et a effectué des mesures de parallaxe sur quelques étoiles. Notamment l’étoile double 61 Cygni  qui présente des conditions favorables car elle est entourée d’étoiles faibles. Les mesures angulaires effectuées à l’aide d’un micromètre, permirent à Piazzi, après plusieurs mois d'observations minutieuses, d’affirmer que la paire avait bougé de 5’’ d'arc par rapport aux étoiles d'arrière plan et d’en déduire la proximité de cette étoile, sans pour autant la calculer.

Piazzi eut également en charge la réforme des poids et mesures de Sicile. En 1817, il fut nommé directeur général de l’observatoire des deux Sicile. Le roi Ferdinand qui avait souhaité créer un observatoire astronomique à Naples, venait de dépenser de fortes sommes dans divers projets dont aucun n’avait vu le jour. Il confia alors à Piazzi le soin de mener à bien cette entreprise qui fut un succès. L’observatoire de Capodimonte  ( ci-contre) inauguré en 1820 devint célèbre dans toute l’Europe. Piazzi finit ses jours à Palerme, où il mourut six ans plus tard, âgé de quatre-vingts ans.