Léon Foucault (1819-1868)
Jean Bernard Léon Foucault (1819-1868) est né à Paris. A l’âge de neuf ans il perd son père qui était un éditeur connu pour sa publication d’une importante collection sur l’histoire de France. Le jeune Foucault vit avec sa mère. Sa santé est fragile et il souffre de troubles de la vision, il est myope d’un œil et hypermétrope de l’autre. Il suit une partie de sa scolarité chez lui, grâce à des cours particuliers. Au dire de ses professeurs, il est un élève plutôt paresseux. Sa mère l’inscrit au collège Stanislas où il devient ami avec Hippolyte Fizeau. A l’issue d’un parcours sans éclat, il obtient son baccalauréat. Les études ne lui conviennent pas vraiment, il leur préfère l’expérimentation, pour laquelle il a révélé des talents prometteurs, lorsque adolescent, il s’amusait à fabriquer des moteurs à vapeur ou des télégraphes. Sa dextérité et son goût pour les sciences l’orientent vers des études de médecine qu’il interrompt lorsqu’un jour, durant de son premier stage dans un hôpital, il s’évanouit à la vue du sang d’un patient. De 1844 à 1847, il assiste le professeur Alfred Donné, physiologiste et physicien, dans ses recherches en microscopie médicale. A l’époque, seule la lumière solaire permet d’éclairer correctement les échantillons observés. Foucault conçoit et réalise un appareil électrique dont les électrodes en charbon produisent une lumière constante et utilisable à tout moment. Une exploitation de son invention permettra même de mettre en place les tout premiers éclairages électriques industriels dans des usines de production. Foucault et Fizeau collaborent sur les comparaisons des lumières artificielles avec la lumière solaire, les propriétés des ondes lumineuses, la polarisation chromatique, les interférences des rayons calorifiques et la vitesse de la lumière suivant le milieu qu’elle traverse .
Il met en évidence, par l’expérience, que la lumière se déplace plus rapidement dans l’air que dans l’eau et confirme ainsi sa nature ondulatoire. En 1862, il mesure sa vitesse en s’appuyant sur les travaux de l’anglais Charles Wheastone, grâce à un ingénieux dispositif de miroirs rotatifs. Il l’établit à 298.000 km/s, se rapprochant de moins de 1% de la valeur réelle. Son nom reste attaché à une célèbre expérience qui montre la rotation de la Terre. Depuis le XVIIème siècle, on avait constaté le déplacement du plan d’oscillation du pendule, sans pour autant pouvoir l’expliquer. Foucault, sait par ailleurs qu’un pendule qui oscille librement, suit invariablement une même trajectoire. Il entrevoit la conséquence de ce phénomène qui permettrait, s’il était mis en évidence, de montrer que la Terre tourne sur elle-même, sans qu’il soit nécessaire de prendre pour référence un objet céleste. Il tente donc de mesurer l’ampleur de la variation du plan d’oscillation et fait quelques essais dans sa cave avec un pendule de 5 kg, suspendu à un fil de 2 m de long. L’expérimentation s’avère probante, si bien que peu de temps après il présente l’expérience à l’Observatoire de Paris avec un pendule de 11 m de long qui fait apparaitre plus nettement la variation apparente du plan d’oscillation.
Pour dévoiler son expérimentation au public, Foucault utilise le dôme du Panthéon pour suspendre un pendule de 28 kg à un câble en acier de 67 m de longueur. L’expérience a lieu le 26 mars 1851, en présence du président Louis Napoléon Bonaparte. Elle a une portée retentissante auprès du public qui se presse pour voir l’évènement. Il est vrai que Foucault a invité la population en ces termes: «Vous êtes invités à venir voir tourner la terre… Le phénomène se développe avec calme, il est fatal, irrésistible. On sent, en le voyant naître et grandir, qu’il n’est pas au pouvoir de l’expérimentateur d’en hâter ni d’en retarder la manifestation... Tout homme mis en présence du fait, demeure quelques instants pensif et silencieux, et généralement il se retire, emportant par-devers lui un sentiment plus pressant et plus vif de notre incessante mobilité dans l’espace.». (ci-dessus, expérience de Foucault reproduite en 1902 par Flammarion et Berget).
Au Panthéon, le pendule est lâché sans vitesse initiale à six mètres du point de repos. Foucault décrit la suite: «Après une oscillation double de 16 secondes de durée, on l'a vu revenir à 2 millimètres et demi environ à gauche du point de départ. Le même effet continuant à se produire à chaque oscillation, la déviation a été grandissant toujours plus, proportionnellement au temps.» Rapidement le monde entier reproduit l’expérience, on voit ainsi des pendules à Oxford, Dublin, Liverpool, York , Rome, Genève, Florence, Bruxelles, Rio de Janeiro, plus de vingt cinq villes américaines et beaucoup d’autres lieux dans le monde. Pourtant certains trouvent à redire, en effet, la rotation du pendule s'effectue plus lentement que la rotation de la terre et Foucault ne parvient pas à expliquer ce phénomène. Cette question l’incite à poursuivre des recherches qui débouchent, en 1852, sur l’invention du gyroscope (ci-contre). Cet instrument met en évidence, de façon simple, la rotation de la Terre. En revanche, sa conception et sa réalisation mécanique ne sont pas aussi aisées, car l’appareil doit pouvoir conserver une rotation rapide (150 à 200 tours/s), pendant suffisamment de temps pour pouvoir effectuer des mesures observables. Sa réalisation est une prouesse technique. L’instrument permet de faire la démonstration de la persistance des axes de rotation par rapport au mouvement diurne de la Terre. Son usage se généralise en navigation. Il est même capable d’indiquer le nord; cette caractéristique est possible par le blocage de certaines pièces de l’appareil qui provoque l’alignement du gyroscope sur le méridien. Actuellement La boussole gyroscopique complète ou remplace la boussole magnétique dans les navires et sert à stabiliser certains engins comme les avions ou le télescope spatial Hubble.
Cet Instrument incontournable conserve une direction fixe en permanence, quelle que soit la latitude à laquelle il est utilisé et, sans qu’aucun recours à l’observation des astres soit nécessaire; ce qui fait dire à Ferdinand Hoeffer dans sa Biographie Générale de 1857: « Qui eut pu croire d’avance que la détermination du méridien eût été possible même au fond d’une mine? ». Foucault effectue également des recherches sur le magnétisme et la mécanique de la chaleur. Il montre comment un corps métallique mis en rotation rapide entre les deux pôles d’un aimant s’échauffe considérablement, de la même manière que s’il était soumis à des frottements, sans pour autant être en contact direct avec un quelconque corps. Il montre aussi comment des courants (qui portent son nom) s’opposent aux causes de la variation du champ extérieur. Un développement industriel de cette découverte est exploité de nos jours dans les ralentisseurs (systèmes électriques de freinage), qui utilisent des propriétés de ces courants de Foucault . Ils sont exploités en particulier sur les poids lourds, les autocars ou dans les chemins de fer. Dans le domaine de l’observation astronomique, Foucault est le premier à réaliser des miroirs de télescope en verre argenté. Ces derniers remplacent progressivement les miroirs en bronze qui nécessitaient de fréquents polissages pour conserver leur propriétés optiques. Ci-contre, le télescope de l’observatoire de Marseille, dont Foucault conçut le miroir de quatre-vingts centimètres. Ce télescope restera en service jusqu’aux années 1950. Foucault n’a jamais occupé de poste officiel. En 1862, il est membre du Bureau des Longitudes et, en 1865, au terme de plusieurs refus, il entre finalement à l’Académie des sciences, qui reconnait ses travaux. Il reçoit également la médaille Copley.
Dans la revue Les Mondes de 1864, Joseph Bertrand écrit: «Monsieur Foucault, on ne doit pas l’ignorer, ne professe pas, il ignore l’art de présenter ses inventions selon les formes de l’école; il persuade contre les règles, et ne sait pas réduire démonstrativement ses contradicteurs au silence… Pourtant toutes ses assertions sont exactes dans les termes mêmes où il les énonce; il sait toutes les routes de la science du mouvement. Il a pénétré au fond de ses théories les plus abstraites… La savante simplicité de ses méthodes aurait été accessible il y a deux cent ans; c’est là son originalité à notre époque et la preuve décisive de son mérite…». Léon Foucault meurt à quarante huit-ans d’une maladie aphasique.