Grote Reber (1911-2002)

Grote Reber (1911-2002) est né à Wheaton, dans la banlieue de Chicago. Il est ingénieur en radioélectricité et a travaillé pendant quatorze années dans différentes entreprises fabriquant des postes de radio. Il est aussi radioamateur durant ses loisirs. En 1932, il entend parler de la découverte de Karl Jansky, qui vient de mettre en évidence les ondes radio émises par notre galaxie. Aussitôt, il se documente et postule pour entrer dans le laboratoire de recherche de la compagnie Bell, où travaille Jansky. Mais Bell, qui n’est pas épargné par la dépression économique qui s’abat sur le pays, ne peut l’engager. Il décide alors de se lancer lui-même dans l’étude des signaux radioélectriques venant du ciel et construit dans son jardin, durant son temps libre, un premier radiotélescope dont il assure lui-même le financement (image ci-dessous).

Son radiotélescope est constitué d’un miroir parabolique métallique de 8 mètres de diamètre avec à son point focal situé à environ huit mètres du miroir, et d’un récepteur radio. Reber choisit cette forme parabolique par analogie avec les miroirs des télescopes optique paraboliques dont une des propriétés est de limiter les aberrations et de focaliser toutes les longueurs d’onde vers un même point. Il pense que c’est la meilleure solution pour ne pas engendrer d’interférences radio susceptibles d’altérer le signal original.

L’ensemble repose sur une structure métallique, conçue pour être orientée dans différentes directions. En 1937, Reber achève ses travaux et procède aux premiers essais. Comme il continue de travailler, il ne peut effectuer ses essais que durant la nuit ou les week-ends. Il se heurte à une première difficulté pour déterminer les longueurs d’onde des signaux qu’il tente de recevoir. Il teste différentes fréquences d’abord 3.300 Mhz puis 900 Mhz, sans obtenir de résultat probant. Enfin, vers 160 Mhz (190 cm de longueur d’onde) il perçoit un signal provenant de la voie lactée. Il commence dés lors à enregistrer systématiquement les signaux qu’il reçoit (ci-dessous).

Reber commence à publier ses travaux et à faire évoluer ses techniques d’enregistrement et entreprend une radiocartographie du ciel permettant de dégager les premiers contours, en suivant des lignes d’intensité constante (à droite ci-dessous ), selon différentes fréquences, ici 160 Mhz pour les deux figures du haut et 480 Mhz  pour celles du bas. Il publie ses résultats en 1949.

La radioastronomie en est alors à ses balbutiements et chaque nouveau progrès est accompagnée d’énigmes qui restent à élucider. Par exemple, Reber fait une découverte qui ne sera expliquée qu’une dizaine d’années plus tard. Dans les années quarante, il est alors communément admis que les ondes radio qui nous proviennent de l’espace, sont dues au rayonnement électromagnétique des corps noirs.

(On se souvient que Gustav Kirchhoff avait montré que le spectre électromagnétique d’un corps dépendait de sa température et que Max Planck et  Willem Wien étaient parvenus à quantifier l’intensité des ondes électromagnétiques émise en fonction de la température).

La ligne verte du schéma ci-contre, illustre le comportement des ondes électromagnétiques suivant leur intensité (en abscisse) et leurs longueurs d’onde (en ordonnée).

Relativement à ce principe, il aurait été logique que l’intensité des signaux que recevait Reber soit plus importante dans les zones à haute énergie (fréquences élevées) que dans celle à basse énergie (fréquences moins élevées). Pourtant, toutes ses mesures indiquaient des résultats inverses, illustrés par la ligne en rouge. Il s’avère, en fait, que Reber mesurait, sans le savoir, une part importante de la radiation synchrotron dont le comportement (ligne rouge) est à l’inverse de la radiation dite thermique (ligne verte).

Dans les année 1950, Reber donne son télescope au NRAO National Radio astronomy observatory, qui le réinstalle sur un nouveau support, permettant une meilleure amplitude d’orientation. Il aide également Karl Jansky et travaille durant quatre années pour le National Institute of Standards and Technology. D’ambitieux projets voient le jour et on construit de gigantesques antennes. Reber qui souhaite reprendre des recherches actives ne peut plus rivaliser. Il décide donc de se consacrer à un domaine délaissé alors par les secteurs institutionnels de la recherche radio-astronomique, celui des basses fréquences, situées entre 1 et 2 Mhz. 

Il construisit des radiotélescopes, mais la majeure partie de ces fréquences étaient absorbées par l’atmosphère. Il décida finalement de se retirer en Tasmanie. Reber était également passionné de Botanique et avait réalisé quelques expérimentations sur les haricots, il était en relation avec des botanistes de l’université de Sidney. Une anecdote raconte qu’un jour alors qu’il était invité pour l’inauguration d’un radiotélescope à Sparkes en Australie, il rencontra le chef du département botanique venu avec la délégation de son université, invitée pour l’occasion. Ce dernier qui ne connaissait Reber que pour ses travaux sur les haricots lui glissa à l’oreille: « Quelle perte de temps que d’inviter deux botanistes pour l’inauguration d’un radiotélescope ! ». Reber qui reçut entre autres la médaille Bruce en 1962, est mort en Tasmanie en 2002.