Bernard Lyot (1897-1952)

Bernard Lyot (1897-1952) est né à Paris. Son père chirurgien, Constant Lyot , meurt alors qu’il n’a que sept ans. Il perd également un frère militaire durant la première guerre mondiale. Après ses études secondaires, il entre à l’école supérieure d’électricité, et obtient son diplôme d’ingénieur en 1917. Il est déjà membre de la Société Astronomique de France, la « SAF » (fondée en 1887 par Camille Flammarion). Son diplôme lui permet d’entrer en tant que préparateur au laboratoire du physicien d’Alfred Pérot, (médaillé Rumford en 1918 pour ses travaux en optique et co-inventeur de l’interféromètre à ondes multiples), qui est professeur à l’École Polytechnique. En 1920, Lyot, recommandé par Pérot entre à l’observatoire de Meudon, dirigé alors par Henri Deslandres. Excellent ingénieur, il réalise divers appareils de mesure et d’observation. En 1929, il achève sa thèse de doctorat qui traite de la polarisation de la lumière réfléchie par les surfaces des planètes, les mesures de cette polarisation permettant d’en déterminer la structure. Suite à ses travaux, Lyot conclue que la surface de Mars doit être balayée par de gigantesques tempêtes de sables. Des observations réalisées en 1970, grâce à des sondes spatiales, confirmeront cette hypothèse. En 1930, il met au point le premier coronographe, instrument qui produit artificiellement une éclipse grâce à un masque qui bloque et rejette la lumière du disque solaire hors du télescope. Il se rend au Pic du Midi pour procéder à l’installation et aux essais de l’instrument. Il obtint un premier succès lorsque pour la première fois, il parvient à détecter la couronne solaire en dehors d’une éclipse. En 1931, ce coronographe donnera également la première photographie de la couronne sans éclipse. Afin de pouvoir observer de manière sélective les principales raies coronales, il conçoit et réalise un filtre à bande passante spectrale plus étroite que les filtres conventionnels, composé d'une superposition de cristaux biréfringents, comme la calcite et le quartz, et de filtres polarisants (formés de molécules orientées dans la même direction).

De nos jours, on trouve des « filtres Lyot » polyvalents, dont la bande passante sélective peut être déplacée sur un domaine spectral de plusieurs centaines de nanomètres. En utilisant son filtre associé au coronographe, Lyot est encore le premier à réaliser un enregistrement cinématographique de l’évolution des protubérances solaires (images ci-contre) qu’il présente en 1939, à l’occasion d’une session de l’Union Astronomique Internationale à Stockholm. En 1941, il obtient un laissez-passer grâce auquel il quitte la zone occupée pour se rendre à l’observatoire du Pic du Midi, où il poursuit ses recherches. Il se consacre alors à l’observation des planètes. Vers 1950, de retour des États-Unis, il rapporte des multiplicateurs d’électrons qui lui permettent de concevoir un polarimètre photoélectrique servant à mesurer la polarisation de la lumière sur la couronne solaire. Il effectue ensuite des relevés spectroscopiques de la couronne, dans le proche infrarouge et y découvre de nouvelles raies spectrales. Lyot occupe la quasi totalité de sa carrière scientifique à étudier des phénomènes optiques particulièrement difficiles à détecter, ce qui fera un jour dire à André Danjon: «Vous ne vous intéressez à un sujet de travail qu’à partir du moment où il a été déclaré insoluble par les experts !». Les travaux de Lyot, en particulier l’invention du coronographe et du filtre polarisant, permettent à la connaissance du Soleil de faire d’énormes progrès en très peu de temps. En dépit de son activité à l’observatoire de Meudon, en 1952, Lyot accepte la direction de la mission franco-égyptienne pour observer une éclipse totale à Khartoum. Il meurt prématurément d’une crise cardiaque dans un train le conduisant au Caire. Il est aujourd’hui considéré comme un des plus grands astrophysiciens français de la première moitié du XXème siècle. En 1939, il fut élu à l’Académie des sciences et reçut la médaille d’or de la Royal Astronomical Society. En 1947, il reçut la médaille Bruce et en 1952, la médaille Draper. Lyot était par ailleurs apprécié de tous ses collègues, pour sa simplicité sa modestie et sa droiture. 

Ci-dessus, en encart, le coronographe de Lyot en 1935, au Pic du Midi qui contraste avec la photographie du coronographe actuel que j’ai prise en octobre 2015. Ce dernier fonctionne cependant suivant le même principe que celui de Lyot, si ce n’est que son équipement en capteurs électroniques permet une surveillance en temps réel de l’activité solaire, à partir d’écrans de contrôle situés dans une salle voisine. Actuellement, cet instrument est exploité par les « Observateurs Associés », association soutenue par des fonds privés (FIDUCIAL) à laquelle j'appartient. Dans ce cadre, nous nous relayons tout au long de l’année par groupes de deux, enchainant des séjours d’une semaine, aux commande du coronographe pour recueillir de précieuses informations sur l’activité solaire.